Séparation du corps et de la conscience - Francis répond - 3

Francis Lucille

  1. Est-ce que l’éveil ou l’illumination ne seraient pas une manière de voir le monde par le biais du lobe droit du cerveau (vision holistique, le paradis ! uniquement voir), par contraste avec le lobe gauche qui travaille sur les détails (vision mathématique, l’enfer !, évaluant les situations)? Et pour aller plus loin, est-ce que toute la pratique spirituelle n’est pas la modification de notre attitude (notre point de vue) sur la Vie? (c’est à dire : n’est-ce pas un sorte de psychothérapie)

  2. Notre corps/cerveau se reconnaît lui-même comme une entité séparée (au moins dès dix-huit mois d’âge). Mieux, notre système immunitaire reconnaît les structures étrangères (corps étrangers, microbes, transplantation…), et les élimine. Alors, comment le concept d’un Soi qui s’ignore (c’est une image) peut-il coller avec ces principes physiologiques?

L’illumination est une compréhension fondée sur l’expérience. Si nous considérons que la compréhension est aussi une forme d’expérience, alors l’illumination est uniquement expérience.

L’ignorance est une illusion, la croyance que vivons une expérience qu’en fait nous n’expérimentons pas. Et ce dont nous ne faisons pas l’expérience, c’est une conscience séparée, ou limitée, ou dépendante du corps - par “conscience”, j’entends ce qui, quoi que cela soit, est en train de lire ces mots en ce moment même et les comprend.

En d’autres mots, l’illumination est la reconnaissance soudaine du fait qu’il n’y a qu’une seule réalité. Une fois que cela a été reconnu, le nom que vous utilisez pour nommer cette Réalité n’a pas d’importance : Dieu, Vérité, Réalité, Être, notre Soi véritable, la réalité ultime de l’univers physique, la réalité ultime de notre mental, notre Présence, etc… Il n’y a qu’une seule Réalité, un seul Dieu, uniquement LUI. Ainsi, l’adage soufi “Où que se porte le regard est la face de Dieu” devient en toute certitude notre expérience quotidienne.

La plupart du temps, la psychologie se préoccupe uniquement du contenu de la conscience, et non de la conscience elle-même, que la psychologie estime être, sans la moindre preuve scientifique en soutien de cette assomption, une “fonction émergeante du cerveau”.

  1. Je suis d’accord avec votre description, jusqu’à un certain point, et pour des buts pratiques (survie du corps et de l’espèce), nous reconnaissons le corps comme étant séparé du reste de l’univers. J’ai précisé “jusqu’à un certain point” parce que s’il était complètement séparé de l’univers, le corps ne pourrait pas interagir avec lui ou en être dépendant (nourriture, eau, oxygène, etc). En fait, du point de vue de la science moderne, de la physique quantique, l’univers est un ensemble non local, chaque particule de notre galaxie étant intrinsèquement liée à toutes les autres particules, même celles situées dans les plus distantes galaxies. De ce point de vue, chaque évènement local observé dans l’univers (comme l’élévation de mon bras droit ou le résultat de la mesure de la polarisation d’un photon) ne peut être considéré comme étant produit localement. Cela implique que cette notion de séparation radicale est une illusion.

De la même manière, les esprits sont séparés, jusqu’à un certain point. Mon mental ne connaît pas votre mental. Toutefois nous communiquons par courriel, donc ils ne sont pas complètement séparées, puisqu’ils communiquent.

La vraie question est : la conscience, qui est la réalité de notre expérience humaine, est-elle séparée et personnelle, ou universelle et divine?

Qu’elle soit ou non séparée n’exclut pas que les corps et les esprits soient séparés dans la limite que nous avons définie précédemment.

Traduit de l’anglais par Stéphane Badach

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